De la vie dans un robot créé avec des cellules organiques

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La création des robots organiques : une innovation majeure

Créés à partir de cellules souches de grenouilles, les robots vivants, appelés « xénorobots », ont été récemment mis au point par des chercheurs. C’est notamment grâce à Joshua Bongard, ingénieur en robotique à l’Université du Vermont, que cette nouvelle forme de vie totalement programmable vient d’éclore. Ces xénorobots s’avèrent être de véritables machines biologiques depuis leur création jusqu’à leurs applications.

Déjà, en avril 2019, des chercheurs de l’Université de Cornell avaient mis en avant leur nouvelle création de vie artificielle, autour de robots constitués d’ADN fabriqués depuis un métabolisme artificiel. D’autres pistes de recherches avaient exploré la possibilité d’édifier des robots souples, à partir d’exemples d’animaux tels que la tortue, le chien ou bien encore la méduse. Or, aucune de ces recherches, abouties ou non, ne peut rivaliser aujourd’hui avec cette innovation robotique, véritable création de machines biologiques de bout en bout, précisent avec satisfaction les chercheurs dans leur étude relayée dans la revue PNAS.

 

robot-organique-grenouille

Un embryon informe programmé

La particularité de ce robot réside, en premier lieu, dans son apparence qui ne se rapproche pas de robots traditionnels ou d’animaux connus. Ce robot vivant se présente en effet comme une sorte d’embryon sans véritable forme si ce n’est que ses cellules sont agencées à partir de la manière dont elles ont été programmées : une apparence complètement aléatoire, unique.

C’est après avoir prélevé des cellules souches sur la grenouille africaine dénommée Xenopus laevis, qu’entre en jeu la puissance génératrice d’un algorithme évolutif qui va brasser des milliers de combinaisons possibles à partir de cellules passives et actives : celles de la peau et celles cardiaques. C’est d’ailleurs par les contractions de ces cellules passives, cardiaques donc, que le biorobot va pouvoir se mouvoir.

Ce n’est qu’ensuite, durant la période d’incubation, que l’on va assister à l’agrégation des cellules entre elles à partir des modèles conçus par l’ordinateur. Dès lors, rentre en jeu la possibilité d’apporter des modifications pour obtenir telle ou telle tâche souhaitée : par exemple, les chercheurs ont pu constater combien certains modèles influaient sur la vitesse ou bien alors amenaient les robots à devenir autonomes en matière de collectage de matériaux ou d’appréhension des objets.

Les capacités inédites de ces robots vivants

Véritable robot organique, le xénorobot déjoue donc toutes les espérances et l’entendement alors admis jusqu’ici. En effet, alors qu’ils mesurent moins d’un millimètre de long, ces robots vivants développent aussi la capacité de pouvoir se mouvoir de façon totalement autonome et même d’interagir entre eux sans avoir besoin d’aucune nourriture durant plusieurs semaines. En outre, deux éléments notables ont été mis à jour par les chercheurs : en premier lieu, la capacité d’auto-subsistance des xénorobots au-delà de leur durée de vie normale de 10 jours, mais également leurs capacités d’auto cicatrisation. Explicitement, les robots organiques sont capables de prolonger leur espérance de vie au contact de nutriments, mais aussi de pouvoir soigner par eux-mêmes d’éventuelles blessures. Mais là ne s’arrêtent pas leurs capacités…

Ce robot vivant détient en effet de quoi bousculer notre entendement actuel. Le xénorobot pourrait, par exemple, être en capacité de collecter tout déchet plastique contenu au fond des océans ou bien de pouvoir aller naviguer dans nos artères afin de détartrer les plaques d’athérome avant de s’autodétruire naturellement. De surcroît, il aurait le potentiel de pouvoir identifier des molécules dans des endroits encore inaccessibles par l’humain et également de pouvoir ingérer des substances radioactives ou toxiques.

Or, ces robots seraient en capacités aussi de tutoyer une forme d’intelligence artificielle en étant capables de cognition via la possibilité de leur greffer des cellules nerveuses et sensorielles. De la science-fiction à la réalité, le pas serait franchi avec l’avènement concret de cette fameuse intelligence artificielle et son lot de jubilation, mais également d’interrogation.

Vers un potentiel qui interroge ?

Il s’agit d’une innovation robotique sans précédent donc, mais prudence aussi, notamment lorsqu’on rappelle que ce projet a été en partie financé par la branche de recherche de l’armée américaine, la Darpa. Sans sombrer dans du scepticisme de principe, il semble judicieux de rappeler combien certaines applications potentielles de ce robot organique posent question. Par exemple, on pourrait imaginer un jour qu’il soit possible que ces xénorobots se reproduisent et puissent investir un organisme à des fins destructrices via un virus mortel par exemple. Rien de cela aujourd’hui n’est possible puisque ces robots vivants sont dirigés par leur conception, laquelle se trouve elle-même sous le joug des algorithmes. Mais, si l’on considère que toute innovation scientifique prévoit des applications à venir, il convient de poser simultanément toute question pouvant prévenir des études de cas qui nous échapperaient alors.

En définitive, devant cette fabuleuse invention, véritable prouesse scientifique, avec ses applications que l’on a rappelées, il convient sereinement de poser les risques encourus. Et de rappeler également combien dans nos sociétés l’intelligence artificielle interroge nos concepts philosophiques, en particulier l’éthique. Comme l’écrivit Rabelais dans Pantagruel :  » Science sans conscience n’est que ruine de l’âme « . À rebours d’un faux procès précédant toute réelle manifestation concrète qui serait dangereuse , convient-il malgré tout d’en repérer en amont les risques potentiels.

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